Paris subway
Marie Fontaine Julien Lootens
petits plaisirs du soir et du matin
Lewis Carroll mit sous le nez de son héroïne Alice un lapin blanc qui allait l'entraîner sous terre, à la découverte d'un extravagant Pays des Merveilles...
Pas de lapin blanc pour Julien Lootens, mais son précieux calepin bleu, fidèle compagnon de ses années d'étude à Paris, gardien muet des impressions furtives, mais néanmoins marquantes, nées de ses rencontres avec les usagers du métro parisien.
L’exploration souterraine à laquelle nous convie l'auteur est elle aussi celle d'un monde des merveilles, résonnant d'un écho joliment nostalgique (l'enfance ?) avec celui d'Alice : "J'aimerais vous faire entrer dans ce monde souterrain que j'ai fait mien et voir avec vous la poésie dont il est plein." nous annonce Julien dès les premières pages.
Le ton est donné. Ici pas de critique virulente de la mécanisation à outrance symbolisée par le métro, qui préfigure celle du monde aérien, seulement des regrets de la part d'un homme qui voudrait communiquer mais doit se contenter de rester spectateur/observateur.
Comprenant, au détour de regards un peu trop appuyés sur ce qui cloche dans son aspect vestimentaire, qu'il peut à son tour devenir l'observé, il décide de s'improviser acteur, mais un acteur passif, pour tenter d'entrer en relation avec les autres usagers.
Pendant une semaine il se baladera dans les rames avec un nez rouge de clown sur la figure. L'accessoire, de couleur pourtant éclatante, ne provoquera pas la rencontre espérée.
Non seulement les adultes semblent avoir définitivement renoncé à leur âme d'enfant, mais de plus ils exigent de leurs propres enfants le même sérieux, la même indifférence à autrui.
Tous les voyageurs sous terre préfèrent rester enfermés dans leurs bulles de silence et rarissimes sont les occasions où elles s'entrouvrent les unes aux autres...
L'œil toujours aux aguets, Julien note tout ce qu'il peut dans son carnet bleu. Pour ne pas oublier...
Au fil des pages se dresse ainsi une galerie impressionniste de personnages hauts en couleurs, toujours croqués à la plume de la tendresse.
Car il y a comme un parfum suranné d'humaniste dans cet homme qui se fond dans la masse des usagers du métro et garde silence pour mieux capter leur essence.
Qui sont-ils ? Où vont-ils ? A quoi rêvent-ils ? Que désirent-ils ?
Tant de questions qui nous renvoient inexorablement à nos propres questionnements.
Mais ne comptez pas sur l'auteur pour vous donner les réponses : lui n'est que le guide qui vous invite à suivre ses traces dans un étonnant cheminement souterrain tout aussi tortueux que les méandres de l'âme humaine, émaillé d'anecdotes amusantes, tendres, poétiques...
Pour ne pas vous perdre, suivez le calepin bleu !
Regards croisés de Marie Fontaine sur le livre de Julien Lootens
Dans le métro un livre tu liras
"Métro parisien, petits plaisirs du soir
et du matin" éditions Julien Lootens
Livre 212 pages, textes et illustrations,
27 février 2011