La pizzeria du Vésuve
De
Pascaline Alleriana
La pizzeria du Vésuve
"les voyages forment la jeunesse"
On n’avait plus entendu parler du Vésuve depuis Pline le Jeune dans sa lettre ouverte à Tacite où il rapporte le récit d’une éruption volcanique sur Pompéï-Herculanum le 24 août 79 après J.C .
Le programme d’échange d’études inter-européen Erasmus d'aujourd'hui comme les premières organisations d’apprentissage des langues des années septantes, proposent l'immersion totale dans une grande aventure culturelle pour notre jeunesse.
Dans le recueil de Pascaline Allériana, le Vésuve réapparaît symbole brûlant de la vie amoureuse d’une jeunesse qui vit tout instant intensément, sans jamais reculer devant l’adversité des aléas de l’existence.
"La jeunesse est le temps de tous les apprentissages. De tous les espoirs, vécus à un rythme effréné par Kenneth l'Irlandais, Gaétan le provincial, Hèlène la Parisienne, et Anselme l'ïlien.Etourdis par les plaisirs du monde, ils se découvrent une audace éclatante ..."
Pas d’unité de lieux dans ce livre, on est en transhumance affective d’un pays à un autre, partir c’est créer la nouvelle passade, on laisse toujours derrière soi une histoire inachevée de désirs, des souvenirs de pizzeria, de bistros à Paris, de Pubs à Londres… on vit mieux en disant la bonne aventure qu'en disant la vérité.
Pour bien assimiler une langue il semble qu’il soit nécessaire de connaître les habitudes et coutumes d’un pays et d’une culture pour comprendre ce que le manuel scolaire à l’attention des collégiens, laisse volontairement dans l’ombre, une richesse que l’on appelle l’expérience et qui est paraît-il intransmissible puisqu’elle trouve son origine dans le moment vécu.
Le grand principe de ce recueil : la liberté de mouvement, le travail sans calcul, la culture irraisonnée et l’âme reflétée par l’étonnement sociétal.
Chacun semble toujours cacher une part de vérité quelle que soit la langue utilisée…Le « laisser volontairement dans l’ombre » est justement là pour vous donner l’envie de toujours être sur la découverte, où le non-dit organisé qui crée des personnages des plus idéaux… la vérité est bombée comme la poitrine de ces demoiselles, échafaudant des histoires mirobolantes.
Et oui il s’en passe des choses entre le premier bouton de chemisier décapsulé et le dernier verre d’une nuit sans fin. Bref, ils font des rencontres cultivées, des mains tièdes écartent les jerseys…. L’important est qu’ils parlent bien même quand ils ont bu …l’immersion linguistique il n’y a que ça de vrai ! Sûrs qu’ils ont une idée sur les filles…Que de canons qui s’effeuillent ! Le monde est fabuleux quand on connaît deux filles, quand on a deux copines ! Surtout si elles sont de cultures différentes.
Kenneth , l’Irlandais qui n’est pas encore majeur ne comprend pas tout des conversations malgré son excellent niveau de langues. Casanova c’est qui ça ? Comme au restaurant il va pouvoir passer commande…il n’a pas encore trouvé l'ivresse dans son assiette, cela ne saurait tarder.
Pascaline Allariana dans ce recueil de nouvelles hétérodiégétiques, verse très naturellement dans le style ‘écriture de scénario’, qui nous rappelle 'à nous les petites anglaises' ou ' l' auberge espagnole… Ici la langue française, anglaise, italienne sont à l’honneur. Le grand challenge étant de découvrir la culture d’un pays en y examinant la maîtresse de son assiette, seize brasseries à évaluer en 48 heures, à raison de 4 repas par jour…assentiments de lèvres sur canapés crudités, déjeuné-surprise ou prise de conscience tardive ‘Tiens que fais-je encore là ? ‘ ; dîner doublé cause astuces duplicate copines, impossible à refuser car tous les frais sont payés d’avance…enfin on se sent vivre ! Ce livre est appétissant !
Le cadrage est entrecoupé de petits descriptifs en écriture italique qui vous donne un aperçu de ce qui se trame en arrière plan dans le city-décor, un contre-champ qui aère le texte, l’autre partie est réservée au récit de l’histoire des personnages.
Entre les étudiants qui font des petits boulots pour payer leurs études et les diplômés, et les éternels chercheurs d’emploi qui les accompagnent, l’ensemble laisse un goût plutôt pittoresque…
La grand blonde « kisétou », dont la clarté s’assombrit comme la lune une fois par mois, et chacun de se demander où passe la lune quand on ne la voit pas !
Chacun travaille sur soi, on bride ses sentiments pour arrondir les angles ! L’espace vital des colocataires est réduit, la promiscuité est rapprochée, impossible de parler de grands angles, pas la place ! C’est la raison pour laquelle, nos grands intello-adulescents ont tous les mêmes grands projets : l’envie des voyages au long cours, presto le bout du monde où qu’on vit la tête en bas, en décollant d’un bond, zou kangourou …
Le présent ne dure pas, l’ambition fléchit, les moments d’espérance sont rarement goûtés sans inquiétude. On écrit dans l'ivresse, on se relit à jeun !
On entend le ventre des garçons gargouiller toujours quand ils sont avec une fille.
Une brasserie diététique, ça augure peu, par contre le Parmentier de canard, avec sa farandole aux épices rehaussée d’un trait de vinaigre balsamique et de la purée sur de la viande émincée…
Hum..cela sent bon les ardeurs du dessous de table !
Il est fortement conseillé d’avoir dîner avant de lire ce livre, sinon vous risquez de grignoter en dégustant de bons verres de vin durant toute la lecture, et ça creuse … votre téléphone portable à portée de main, en attente d’un Florent tisseur de rêve…Si vous n’avez personne à vous mettre sous la dent vous pourriez vous sentir en manque …Ce livre est excitant !
Pascaline Alleriana est une fine mouche, l’œil de sa caméra toujours à l’affût du passage érotique, zoom sur l’ivresse de votre assiette. Le restaurant espace limité, est doublé optiquement par le miroir qui recouvre le mur du fond de la salle. Voyons…Voyons !
La voix de Laetitia devient paysage. Attentif à ses gestes et à ses émotions, il progresse vers son corps, il devine tout : sensations détails, réactions…Quatre rendez-vous puis elle le lâche par téléphone et sans explications …il pourrait y avoir aiguille sous couette !
Solène, son cache-cœur la révèle volontiers, sa peau claire et rebondie, quand elle se penche laisse sa gorge profonde timide, mémoriser les détails …elles sont toutes les mêmes…pensent-ils !
Bien sûr pas d’érotisme sans humour :
Florent :
« - Je vous suis… Je vous ai rencontrée cette nuit, dans votre chambre. »
Hélène :
« -Vous voyez, vous déraillez comme les trains et vous êtes à l’arrêt, pourtant ! »
Pascaline Alleriana, monteuse de film, vous fait son cinéma , les décors naturels sont couchés sur le papier, les pensées des personnages apparaissent comme des bulles se répondant à la manière des bandes dessinées..
Le lecteur squatte tour à tour les pensées des personnages.
« Océan immobile. Lune ronde au-dessus de la plage, reflets sur le sable. Ciel piqué de blanc, points d’étoiles à l’infini….La nuit s’étire en frémissant…présent, je cherche l’horizon pour me donner le vertige …je suis ailleurs ….une pensée flotte dans ma tête : j’apprends son corps malgré moi…je l’embrasse, mon ventre se tord. Je m’arrête, …mes mains sont sur elle ? En silence comme dans un rêve, son corps s’agrandit, je le perçois infiniment….le matin s’affale sur la nuit…Harassé, Indécis. »
« Elle sort de l’eau, s’allonge. Sur moi. Sa peau est froide et son corps lisse. Elle s’installe.Ses mains m’étreignent, elle noue ses bras ….elle reprend, enfonce ses hanches dans le sable, glisse mes doigts entre les siens…elle ondule entre mes bras, ensommeillée, silencieuse…elle est bien ici…Elle se retourne et me rabat comme une couverture… »
Les jeunes gens adorent lire partout sauf à la bibliothèque, ils lisent même dans la rue quand il pleut : ils savent depuis longtemps passer entre les gouttes. Leur vie est comparable aux zigzags des slalomeurs, ils apprennent la mort soudaine de leurs amis sans broncher, les évènements les saisissent sans les toucher … des passages à vide ils préfèrent en rire…
Dans les quatre nouvelles de ce recueil, se nouent d’âpres destins sur fond d’ailleurs, car la jeunesse est restée étrangère à elle-même pour posséder l’intensité.
"La Pizzeria du Vésuve"
Recueil de nouvelles
Auteur: Pascaline Alleriana
éditions Kirographaires,
broché 28/10/2011
ISBN 978-2-8225-0049-4
se procurer le livre Editions kirographaires
Marie-Christine Dehove © frenchwritersworldwide.com
27 décembre 2011
Livre sélectionné pour le livre du mois de janvier 2012
En savoir plus sur Pascaline Alleriana
Lettre ouverte de Pascaline Alleriana : Aller à la rencontre du bonheur